Episode 3 : tsunamis d'émotions

Tout autant épuisée par sa journée que par sa soirée riche en émotions et n’ayant pas apprécié la réaction de son amie, Aurore propose à Anna de s’en aller. De toute manière, la conversation sur son boulot est close ! 

De son côté Anna n’insiste pas davantage sur le message qu’elle voulait faire passer afin d’aider son amie à retrouver confiance en elle. Pour le moment Aurore a réagi à chaud, guidée par son ego, lui-même piqué au vif. Anna fait confiance à Aurore pour analyser plus calmement la situation une fois la tension retombée. Comme souvent Aurore va avoir besoin de temps pour se remettre en question et comprendre sa première réaction de “défense”. 

 

Les deux amies se souhaitent une belle fin de soirée et chacune repart de son côté.

 

Sur le retour, Aurore n’en veut même pas à Anna de l’avoir brusquée ainsi. Elle n’en a plus la force. et a enclenché le pilotage automatique vers son appartement se contentant de marcher tout en pleurant. Dans ces rues où elle ne connaît personne, elle peut pleurer autant qu’elle le désire. C’est tellement difficile d’être si sensible…..elle aimerait tant pouvoir “laisser tomber et passer rapidement à autre chose” comme d’autres personnes dites plus “normales” semblent si bien savoir le faire. 

 

Cette nuit-là, chamboulée émotionnellement, Aurore dort très mal. Elle se réveille très souvent et se repasse le film de sa journée. Entre deux réveils son sommeil est agité et ses rêves orientés vers ce qui la contrarie. 

Au petit matin, elle ne se sent pas plus reposée que la veille.  La journée s’annonce douloureuse. D’ordinaire elle est déjà à fleur de peau, alors je vous laisse imaginer son état de matin là !  

 

Résignée, elle prend le chemin du travail en s’activant pour ne pas être en retard. 

 

Malgré ce poids sur l’estomac qui, ces derniers temps, ne semble pas décidé à la quitter, elle s'émerveille du printemps qui tout doucement renaît sur le chemin de son travail. Tout en marchant, elle s’aperçoit de la présence des fleurs de plus en plus nombreuses. De jolies couleurs qui l’aident à mettre de la gaieté dans son quotidien. Aurore aime vraiment les odeurs et les couleurs du printemps, comme un arc-en-ciel qui efface la grisaille quotidienne. C’est aussi ça être hypersensible : savoir s’émerveiller de tout ce à quoi tant d’autres ont fini par s’habituer et ne remarquent même plus. 

 

En arrivant au boulot, Aurore croise Sam, un collègue lui aussi très sensible avec qui elle s’entend à merveille. Ils ont des conversations profondes, ce qui ravit Aurore. Mais ce matin Sam a l’air pressé, il passe devant elle, la tête dans ses dossiers. Il ne la remarque même pas, pas plus qu’il ne lui répond quand elle le salue. 

 

Aurore sent de nouveau le nœud se former dans son estomac. “Pourquoi ne lui a-t-il pas répondu ? Que se passe-t-il ? Est-ce qu’il lui en veut pour quelque chose ? Lui qui d’ordinaire est si attentif….” Son cerveau carbure à 200 à l’heure et s’emballe. Guidé par les insécurités de son hôte, ce dernier cherche des explications. Tout à coup Aurore percute : elle n’a toujours pas répondu à l’email que Sam lui a envoyé hier !
Dès lors, c’est comme une évidence qui lui saute aux yeux, maintenant qu’elle y pense. Répondre aux messages et être ponctuel sont les deux formes élémentaires de respect l’un de l’autre. Elle a failli sur la première et s’en veut terriblement. Elle aimerait pouvoir s’excuser auprès de son collègue pour se faire pardonner mais il est déjà parti loin. 

 

Un peu avant midi Aurore passe dans le bureau de Sam afin qu’ils déjeunent ensemble à la cafétéria. C’est devenu une tradition entre eux : tous les jeudi midi ils ont instauré ce rituel. Mais pas aujourd’hui visiblement. Sam n’est pas dans son bureau et il ne lui a envoyé aucun message d’explication ni sur son téléphone ni par email. Aurore est vraiment déçue : elle a résisté toute la matinée à lui écrire, préférant s’expliquer de vive voix. Peu à peu la panique s’installe : il doit vraiment lui en vouloir pour faire sauter la tradition du jeudi. 

 

Au même moment, un petit oiseau vient se poser sur la branche devant la fenêtre du couloir menant au bureau de Sam. Il commence à gazouiller. Par chance, le bâtiment est plutôt ancien et ne disposant pas de double vitrage, la jeune femme entend donc très bien le joli chant de l’oiseau. Dans son regard embué par les émotions, Aurore le remercie de tout son cœur. Elle aimerait tant pouvoir s’envoler loin de ce quotidien si lourd à vivre. 

 

Aurore repart à son bureau. Ses émotions lui ont coupé l'appétit. Autant retourner bosser et avancer sur les dossiers. De toute façon, elle a des kilos en trop. Alors ce n’est pas plus mal. Se noyer dans le travail l’aidera à moins penser à ce qui est douloureux.  

 

À suivre …