Episode 2 : prisons mentales

 

A midi, épuisée par cette boule au ventre qui ne la lâche plus, Aurore décide de proposer à son amie Anna une sortie au restaurant le soir même. Elle a vraiment besoin de sa meilleure amie pour la réconforter. Elle a besoin de parler de ce qu’elle vit et de ce qu’elle ressent. Elle n’en peut plus, il faut que ça sorte. Et qu’au moins une autre personne connaisse la vérité. 

 

Depuis quelques années déjà qu’Aurore se confie à son amie Anna, elle lui a toujours fait confiance en lui révélant ses secrets les plus intimes. Aurore ne se sent jamais jugée, toujours accueillie comme elle est, malgré ses défauts. Comme Anna est hypersensible elle aussi, elles ont beaucoup de points en commun toutes les deux. 

 

À 19h elles se retrouvent donc au restaurant. Comme souvent Anna est en retard. Aurore a du mal à le supporter, considérant cela comme un manque de respect. Sans compter que c’est une sacrée perte de temps !
Mais Aurore ne dit rien à Anna. Elle aurait trop peur de perdre son amie si elle lui en faisait le reproche. Parler de soi est une chose. Faire des reproches en est une autre. Alors elle le garde pour elle. 

Elle encaisse et se dit que ça ira mieux après : une fois qu’elle aura pu se confier sur tout le reste. “Choisis tes combats” lui avait dit une fois Anna. Elle se dit que c’est peut être l’occasion de mettre en pratique.   

 

Attablées, les deux amies conversent des dernières nouveautés de leurs vies respectives. Histoire de “se mettre à jour”. Puis, rapidement, ce qui doit sortir finit par sortir. 

De fil en aiguille Aurore en arrive à l’épisode avec sa patronne qui la tourmente depuis la veille. Et de manière générale à tout ce qu’elle reproche à cette femme, tout ce qui la blesse au quotidien, tout ce qui fait qu’elle part trop souvent le matin avec la boule au ventre.

 

Anna comprend que son amie a besoin d’évacuer et lui offre un espace approprié. Elle ne l’interrompt pas. Elle l’écoute attentivement et essaie de comprendre la réalité émotionnelle de son amie. Au-delà des apparences, quelle est la véritable cause de son mal-être ? au-delà des apparences ? 

 

Pendant ce temps Aurore est passée en mode “mitraillette à reproches”. Elle déballe tout : ce qu’il s’est passé la veille et à quel point ce n’est finalement pas un événement “isolé”.  À quel point elle n’est pas reconnue à sa juste valeur. A quel point elle ne peut rien y faire : dès qu’elle essaie de s'expliquer, ça lui retombe dessus. 

 

À mesure qu’elle évacue toute la rancœur en elle, Aurore se sent de plus en plus légère. Il ne reste plus qu’une seule chose pour se sentir vraiment mieux : l’approbation d’Anna. Elle s’est sentie écoutée. Elle a maintenant besoin de se sentir comprise et reconnue. 

Mais voilà ce coup-ci Anna ne répond rien. Aurore est déroutée : “que se passe-t-il ? pourquoi son amie, d’habitude pleine de paroles réconfortantes, ne dit rien ??

 

Anna, qui a compris le “problème” d’Aurore et veut vraiment l’aider cette fois, finit par lui demander sur un ton énigmatique “qu’attends-tu de moi ?

Aurore (surprise) : “ben….que tu me donnes ton avis

Anna : “d’accord, et pourquoi as-tu besoin de mon avis ?

 

Aurore n’en revient pas : son amie ne semble pas disposée à l’aider…. pourquoi ?? que pense-t-elle vraiment ? est-elle du côté de sa patronne ? en a-t-elle assez de l’entendre se plaindre ? peut-être la soule-t-elle avec ses histoires….déjà qu’elle se “soule” déjà elle-même….!

En pleine panique son cerveau s'emballe rapidement, imaginant les pires scénario à mesure que son cœur tombe dans une vertigineuse chute libre. Aurore prétexte le besoin d’aller aux toilettes pour se réfugier et pleurer à l'abri des regards. C’en est trop pour elle. Tout ce qu’elle a accumulé ces derniers jours finit par ressortir. 

 

Au bout d’un certain temps, ne voulant pas éveiller les soupçons, elle sèche ses larmes tant bien que mal puis retourne à table. Aurore essaie de faire bonne figure mais aucun mot ne parvient à sortir de sa bouche. Elle se sent vidée, par les larmes, la fatigue, les émotions. Elle ne supporte pas les silences mais ce n’est pas elle qui rompra celui-ci. Elle n’en a pas la force. 

 

Voyant la mine déconfite de son amie et le malaise toujours omniprésent, Anna, qui connaît bien son amie, sent que quelque chose ne va pas. Ces 5 min aux toilettes juste après sa remarque ne sont probablement pas une coïncidence. “Qu’est-ce qu’il y a ?” lui demande-t-elle. 

 

Aurore qui ne voit pas comment lui expliquer son mal-être en évitant tout reproche (donc tout risque de froisser son amie), lui répond simplement “rien de spécial, c’est la fatigue, ça va passer”. 

 

Anna n’est pas dupe, alors elle fait un pas vers son amie en lui disant : “Je comprends ta frustration, ta déception et ta colère par rapport à ton boulot. “Tu penses avoir besoin de mon avis mais c’est faux car tu as les réponses en toi ! J’ai confiance en ton jugement, tu as besoin toi aussi de te faire plus confiance”.

 

Bam ! Anna a déclenché un cataclysme chez Aurore. Après une panique généralisée suivie d’un profond soulagement dû au fait que son amie ne la rejette pas, Aurore se sent vexée par cette “leçon de morale” non sollicitée. Ce n’est pas une question de confiance en soi mais de reconnaissance de son travail et de ses capacités ! 

 

À suivre ….